Face à la feuille blanche, le poète cherche à retranscrire la quintessence de ce qu'il voit et ressent. Le Haïku se prête bien à cet exercice d'émerveillement, condensé, il se penche sur l'indicible et extrait ces trois vers, comme un pont entre nous et le monde.
Dans sa préface, Akiyama Yutaka, l’éditeur de ses Œuvres complètes au Japon raconte que Soseki définissait l'haïku comme "en premier lieu, un concentré de rhétorique, en second lieu, il est un univers irradiant à partir d'un point focal, comme le rivet d'un éventail qui permet de maintenir ensemble toutes ses branches." A la lecture de ses poèmes, les sensations qui nous traversent filent droit vers notre point focal pour s'épanouir en nous. En transcrivant ses états d'âme par le biais des haïkus mais aussi de ses peintures, le poète résonne jusqu'aux confins de notre être !
"L'existence humaine se résume à une course contre la noirceur du monde, les traîtrises, la cruauté, la lâcheté, une course qui paraît si souvent tellement désespérée, mais que nous livrons tout de même tant que l'espoir subsiste."
Le village se prépare pour une sortie en mer des pêcheurs. Parmi eux, Bárður, pêcheur à la morue, fasciné par les mots et captivé par sa lecture du Paradis perdu, du grand poète anglais Milton. Il est accompagné du "gamin", un jeune homme de vingt ans, son meilleur ami. Mais malheureusement, trop occupé à retenir les vers de Milton, le pêcheur néglige les préparatifs et oublie sa vareuse seule capable de le protéger des intempéries meurtrières en mer. Après ce voyage, le jeune garçon restera suspendu entre ciel et terre, incertain, en route pour rendre le Paradis perdu à son propriétaire, avançant pas à pas, perclus de douleur.
"L'enfer, c'est d'être mort et de prendre conscience que vous n'avez pas accordé assez d'attention à la vie à l'époque où vous en aviez la possibilité. "
Dans un texte profondément humain et porteur d'espoir, l'auteur prouve sa capacité à capturer l'essence de la condition humaine. Il propose une réflexion poignante sur la vie dans un environnement rude et impitoyable, tout en mettant en lumière la force et la résilience de l'esprit humain. De ce monde âpre, les deux pêcheurs islandais pouvaient s'échapper par le pouvoir des mots, enrichissant ainsi leur univers :
"Certains mots sont probablement aptes à changer le monde, ils ont le pouvoir de nous consoler et de sécher nos larmes. Certains mots sont des balles de fusil, d’autres des notes de violon. Certains sont capables de faire fondre la glace qui nous enserre le cœur et il est même possible de les dépêcher comme des cohortes de sauveteurs quand les jours sont contraires et que nous ne sommes peut-être ni vivants ni morts. "
Leur errance s'apparente finalement à une métaphore de cette quête infinie et éternelle qui consiste à donner un sens à son existence "tout ce que nous pouvons faire, c'est espérer au plus profond de nous-mêmes, à l'endroit où bat le cœur et où s'ancrent les rêves, qu'aucune vie ne soit en vain, ne soit sans but."
Pour eux, le sens serait peut être dans la solidarité, cette fraternité qui relie les humains et nous sauve de la solitude : "Nous devons prendre soin de ceux qui nous sont chers et à qui nous le sommes. Ce doit être là l'une des lois de l'existence et le diable botte le cul de ceux qui ne s'y plient pas."
Le roman est porté par une prose poétique magnifique, qui nous emporte aux confins de l'Islande auprès de ces hommes perdus dans ces matins sans aube.
"L'homme est une créature étonnante. Il lutte contre les puissances naturelles, triomphe de difficultés apparemment insurmontables, il est le seigneur de la terre et pourtant, il maîtrise aussi peu sa pensée que les gouffres qu'elle recouvre, qu'abritent ces abîmes, comment se forment-ils, et d'où nous viennent-ils, ces profondeurs obéissent-elles à des lois ou bien l'homme traverse-t-il la vie avec, au fond de l'âme, un périlleux chaos ? "
Il s'agit du premier volet d'une quête initiatique : suivront La Tristesse Des Anges et Le Cœur de l'homme.
Littéraflure écrit des chroniques littéraires sur les réseaux revendiquant clairement ses avis, "éraflant" quand bon lui semble les auteurs.
Elle propose ici son "manifeste" : elle se plaint du nombre de romans inutiles publiés, se plaint des éditeurs qui ne prennent plus de risques, des journalistes et chroniqueurs qui n'ont pas le temps de lire tous les livres chroniqués, se plaint des libraires qui mettent en avant les livres plébiscités, et se plaint surtout des bookstragrammeuses qu'elle peint comme des midinettes incapables de donner leur avis "Démonter un roman ! Elles en semblent incapables. Elles se limitent à mettre en scène la couverture du livre (la photo), à le résumer (le commentaire) et à dire si elles l'ont aimé ou pas. Pire, certains comptes se bornent à paraphraser ou à copier la quatrième de couverture." Ces demoiselles selon Littéraflure se plaisent à montrer leur décolleté ou leurs jambes pour qu'on lise leur chronique. Tel le chevalier blanc venant sauver la dame en perdition, Littéraflure se propose donc de créer un profil Instagram avec "de vraies critiques littéraires" (et c'est là que vous vous exclamez, conquis "enfinnn !")
Soit.
Point de décolletés, point de bikinis -ou de slips kangourous-, juste le livre, et sa critique.
Elle choisit l'anonymat, ce qu'elle justifie longuement dans son "manifeste" étant donné qu'elle a publié déjà cinq romans.
Bref.
A la question faut-il acheter son "manifeste" je répondrais en normande "oui et non"...
Je dirais non si vous n'avez pas, comme elle, un budget de 1800 euros par an en achat de livres. Ce serait 10 euros jetés aux oubliettes quand toutes -ou presque- les idées développées ici sont déjà sur ses profils et dans les commentaires. Si - comme elle semble le présupposer - vous êtes intrigués et prêts à mener une enquête à la Sherlock Holmes pour découvrir qui se cache derrière son profil, vous faites là encore fausse route car point de réponse en ces pages, quelques indices savamment parsemés pour entretenir le mythe sont disséminés, mais avouons-le Sherlock aurait depuis longtemps refusé cette enquête vide de sens !
Si par contre vous avez ce budget illimité - et n'êtes pas réfractaire aux achats sur Amazon - vous pouvez tenter l'aventure, le manifeste et ce profil ayant l'intérêt de relancer des débats immémoriaux sur le monde de l'édition, la différence entre un journaliste et un bookstragrammeur, la question de l'indépendance d'opinion posée par les SP (services de presse) ou par la tendance aux amitiés soudaines qui se créent avec des auteurs / autrices ou attachées de presse, pensant ainsi que l'on aura des scrupules à dire "je n'ai pas aimé ton roman". Cela fait 14 ans que je tiens mon blog et ces débats ne sont pas nouveaux, certes, mais ils ont peut-être été noyés dans les commentaires moins visibles, et il n'est pas mauvais de les remettre sur le devant de la scène. Idem pour les pratiques des Instagrammeurs, l'achat d'abonnés et de likes, si visibles sur certains profils, l'hypocrisie des likes qu'on doit rendre pour en obtenir, les abonnés qui disparaissent en une heure parce que vous n'avez pas daigné vous abonner à leur profil, l'égocentrisme du système, la valeur marchande de certains profils à qui les éditeurs demandent "vous n'auriez pas un roman à publier dans vos tiroirs" ?
Et maintenant, me direz-vous ? Là vient le chapitre intéressant du livre, le but ultime : créer un magazine littéraire de référence, indépendant. Projet louable s'il en est, qui regrouperait des chroniqueurs indépendants "autorisés" à érafler.
Un corps est retrouvé calciné, une croix sanglante tracée à la hache sur le front. Félix Chacaltana, substitut du procureur dans la ville d’Ayacucho, s’interroge. Est-ce un retour des terroristes du Sentier Lumineux ? Ou des catholiques fanatiques, qui célèbrent à leur manière le Mercredi des Cendres et la semaine sainte ?
L'intrigue, qui se déroule au Pérou, est fortement inspiré par les événements de la guerre civile qui a secoué le pays dans les années 1980 et 1990, opposant le gouvernement péruvien et le groupe terroriste maoïste, le Sentier lumineux. Le titre du livre fait référence à la période du "Avril rouge" en 1983, lorsque le Sentier lumineux a déclenché une vague de violence à travers le pays.
Le roman explore ainsi les thèmes de la violence politique, de la corruption et de la trahison à travers l'évolution du personnage principal Félix Chacaltana Saldívar, un bureaucrate obsédé par l'ordre et la loi, qui se retrouve plongé dans cette série de meurtres mystérieux.
Roncagliolo offre une analyse profonde de la société péruvienne, mettant en lumière les fissures sociales et politiques qui ont permis à la violence de s'enraciner. Son écriture est souvent acérée et sans compromis, décrivant de manière saisissante la brutalité de la guerre civile et ses conséquences sur les individus et la société dans son ensemble. Cela lui permet aussi d'offrir une réflexion sur la nature de la justice et de la moralité dans des circonstances extrêmes. C'est un livre qui pousse le lecteur à remettre en question ses propres convictions et à examiner de près les dilemmes moraux auxquels sont confrontés les personnages.
"Il se sentait comme le gardien des biens que tout le monde avait laissés et sa présence était comme un signe, un symbole de vie pacifique opposé à la violence de la guerre."
Sur le plateau d'Asagio, dans les Alpes italiennes, Tönle tente de subvenir aux besoins de sa famille. Il s'adonne ainsi à la contrebande, jusqu'au jour où il blesse malencontreusement un douanier et qu'il doit fuir, poursuivi par la justice. Il devient alors mineur en Styrie, colporteur d'estampes dans les carpates, jardinier à Prague. Chaque hiver, il retourne chez lui, n'ayant de cesse de vouloir retrouver les siens, sa maison, son cerisier sur le toit, le potager sur le devant. Même si la première guerre mondiale bouleverse alors les destins, Tönle restera fidèle à cette image simple du paradis perdu et du bonheur. Dés que l'occasion se marchera, il marchera vers sa maison, vieillard têtu dont le bonheur a été sacrifié par les luttes de pouvoir inhérentes à l'Histoire.
Etre solaire, parlant plusieurs langues, il se fond dans le paysage et prouve l'inanité des frontières et des guerres qui tuent l'humain. En opposition avec l'autorité étatique et militaire, qu'elle soit nationale ou étrangère, il fait valoir le pragmatisme terre-à-terre, l'orgueil communautaire et le désir de préserver une existence paisible sur la terre héritée de ses ancêtres, accompagné de son fidèle chien et de son troupeau de moutons, sans avoir besoin de solliciter l'aide du reste du monde. Sur sa route le vieil homme rencontre des hommes bons qui se moquent des nationalités et savent voir en lui un humain lumineux attaché à sa terre et aux siens.
Lui-même ici des hauts plateaux, Mario Rigoni Stern rend hommage à ses racines avec simplicité et humilité au travers de récits, qui avec une économie de mots reviennent à l'essentiel : un foyer, une famille, une vie simple en accord avec la nature.
Un très beau chant mélancolique qui place l'humain au cœur de ses préoccupations !
On me demande souvent quels sont mes auteurs favoris, et de but en blanc, quelquefois il m'est difficile de répondre (peut-être parce qu'ils sont trop nombreux...) J'ai repris sur le blog les auteurs les plus cités et appréciés :
« L’existence, c’était ça : la naissance incertaine de l’aube, le souffle d’un enfant endormi, et un homme aux grosses mains d’assassin, assis dans le noir, en train de souffrir. »
Au sud du Chili, dans une ferme reculée vit un couple et leur enfant Paolo "une sorte de balbutiement, un simple murmure d’humanité. » Mais un beau jour arrive Angel Allegria, assassin sans scrupules qui dépouille les vieilles, escroque les jeunes et tue ceux qui lui résistent. Il tue sans vergogne les parents pour réquisitionner la maison mais garde l'enfant vivant. Ils vivent ainsi loin du monde, jusqu'à ce que Luis Secunda se présente à son tour et que Angel lui épargne la vie.
C'est l'histoire d'un homme cruel qui devient humain au contact de l'innocence et de l'amour de l'enfant.
C'est l'histoire d'un enfant qui s'attache à cet homme que le destin a placé sur son chemin.
C'est l'histoire de ceux qui pensent aimer la solitude.
C'est l'histoire de ceux qui ont des rêves effrayants.
C'est l'histoire de ceux qui les condamnent, parce qu'ils ne savent pas distinguer le bien du mal, les bons des méchants, les honnêtes gens des malhonnêtes et qu'ils préfèrent juger sans scrupules à l'aune du passé.
C'est l'histoire de ceux qui construisent la beauté sur les ruines...
« L’écologie sans révolution, c’est du jardinage. »
En 2020, Virgil Solal mène une opération d'évacuation d'un village nigérian victime de la pollution pétrolière. Il rentre à Paris pour assister à l'accouchement de sa femme mais malheureusement, leur petite fille est mort-née. Deux ans plus tard, le PDG de Total est enlevé. Nathan, capitaine de police, et Diane, psychologue, sont chargés de l'enquête et des négociations.
En prenant comme prétexte une intrigue policière, Olivier Norek alerte ici sur la « destruction durable » de la planète, et sur l'accélération de la catastrophe puisque il existe 9 millions de morts annuels par pollution soit 25000 par jour. Il annonce un conflit planétaire.
"Nous sommes les grenouilles et le bocal notre planète, nous nous accoutumons à l’extinction des espèces animales, à l’explosion de la mortalité infantile, à l’anéantissement des grandes forêts ; à la fonte des glaciers, à la raréfaction de l’eau potable, aux tempêtes, aux inondations et étés qui se transforment en mortelles canicules. Cela sur des générations si bien qu’on s’est habitué, comme la grenouille."
Il pointe ici du doigt le rôle des grandes entreprises :
« Rien ne se fera sans la finance et les grandes entreprises. C’est avec elles que nous changerons le monde et pas avec les poubelles vertes, bleues ou jaunes. »
« Personne ne semble prêt à se défaire ni de son confort, ni de ses habitudes. Tant que le choix sera laissé, l’option du moins contraignant gagnera. » Il faut choisir pour le citoyen « il faut des lois d’obligation » pour les citoyens et les grands entreprises.
Il nous alerte sur l'état de notre planète en montrant les effets dévastateurs de la pollution : il insère des nouvelles du monde et références documentées, avec les animaux au comportement anarchique, les iles qui disparaissent, les canicules, les incendies destructeurs et pourtant aux EU 30 % de la population ne croit pas au réchauffement climatique ! Dans 30 ans entre la pollution, le manque d’eau potable, la famine, la montée des eaux, 5 milliards d’êtres humains seront en péril et nous sommes 8 milliards.
Face à cette situation, que faire ? Pour le héros il s'agit de faire ce qui est juste, si le gouvernement viole les droits du peuple, l'insurrection n'est-elle pas légitime ? « La résistance violente intervient lorsque la résistance passive a abattu toutes ses cartes. »
Ce que j'ai moins aimé :
Le roman manque de nuances, il charge les grandes entreprises et propose un catalogue alarmiste pour lancer ensuite son message didactique de façon quelque peu forcée...
Bilan :
Si le roman pointe du doigt de façon peut être un peu forcée les industries polluantes, les grandes banques, les politiques, il cherche aussi à nous responsabiliser en tant que citoyen du monde conscient des risques encourus. et de l'impact de nos actions sur l'avenir !